mercredi 21 novembre 2012

La Coiffe qui décoiffe


Sans être aussi stakhanoviste que mon camarade Alex Nikolavitch, je traduis beaucoup, beaucoup de choses. Mais j'en ai rarement autant sué que sur la version française de The Birth Caul, à paraître aux éditions çà et là, que je viens de terminer. 
Au départ, The Birth Caul (littéralement : "La Coiffe de naissance") est le texte d'une performance donnée par Alan Moore le 18 novembre 1995 au Vieux Tribunal de Comté de Newcastle-upon-Tyne. Cette performance restera unique, comme toutes celles d'Alan Moore, qui ne les considère pas à proprement parler comme des spectacles mais plutôt comme des cérémonies magiques. Quelques années plus tard, Eddie Campbell, collaborateur de Moore sur From Hell, propose au barbu de Northampton de réaliser une adaptation graphique du texte. Il l'édite en 1999 dans le cadre de sa maison d'édition eddie campbell comics. Cette version a été reprise en 2010 chez l'éditeur anglais Knockabout avec une autre adaptation de Cambell d'un texte de Moore, Snakes and Ladders, dans un volume intitulé A Disease of Language.
Mais, me direz-vous, qu'est-ce qu'il y avait donc de si compliqué à traduire dans ce petit bouquin de quarante-huit pages ? Rien. Et tout. Alan Moore n'y utilise pas de mots compliqués ni de tournures de phrases tarabiscotées, son texte étant conçu pour être lu à voix haute devant un public censé l'appréhender immédiatement, puisqu'il n'avait pas la possibilité de revenir en arrière. Mais Moore use d'une langue très riche, précise, garnissant ses substantifs de nombreux épithètes, dont la sonorité compte presque autant que le sens. Bref, une langue poétique, dont n'importe quel traducteur vous dira que c'est la plus difficile à traduire, justement à cause de cet entremêlement du sens et du son qui en fait la spécificité. Autant dire que les quelque cinq cents pages de From Hell n'étaient qu'amusette comparées à ces quarante-huit pages là. 

2 commentaires:

Alex Nikolavitch a dit…

tu sais, je stakhanoviserais nettement moins si je n'avais pas une famille à nourrir : j'ai plein de projets perso qui marquent le pas (et une conférence à finir de rédiger, broum-brouloumpf), juste parce qu'un gros knightfall traduit en quinze jours me rapporte autant qu'un album qui me met entre six mois et un an à écrire.

c'est tragique.

tu nous tiens au jus pour la sortie de Birthcaul, d'ailleurs. Je n'en ai que quelques enregistrements, ce sera peut-être l'occasion d'y comprendre quelque chose.

Jean-Paul Jennequin a dit…

Ne sois pas si modeste. Précisons que la conférence en question s'intitule "BD et fins du monde", qu'elle aura lieu le samedi 2 février 2013 à partir de 12h au Conservatoire Gabriel Fauré dans la belle ville d'Angoulême lors de son 40e Festival International de la BD.

Sauf si les Mayas avaient raison, auquel cas tu auras bossé pour rien.