vendredi 31 mai 2013

Coïncidences

Il arrive qu'un livre ou un auteur surgisse dans votre conscience à quelques jours d'intervalles via des sources très éloignées. On ne peut alors que s'émerveiller de la coïncidence. À plus forte raison quand cela arrive deux fois la même semaine.

Jeudi avant-dernier, j'avais assisté à un débat sur les relations entre Pop Art et BD où l'on avait pas mal discuté de la notion d'appropriation. Cette semaine, j'ai lu le petit essai en forme de collage de David Shields How Literature Saved My Life et il y parle beaucoup d'appropriation, en particulier dans le domaine littéraire.

Dans la foulée, j'ai dévoré le volume de mémoires de Diana Athill Stet - An Editor's Life. Ancienne directrice littéraire aux éditions André Deutsch, l'auteure y raconte dans une première partie sa carrière (fort intéressant témoignage sur le monde de l'édition britannique d'après-guerre) et, dans une seconde partie, parle de ses relations amicales ou non avec un certain nombre d'auteurs qu'elle a publiés. Le premier cité est un auteur canadien, Mordecai Richler, dont je n'avais jamais entendu parler. Et voilà qu'aujourd'hui, dans le Guardian, il est question de la ressortie d'un film oublié, The Apprenticeship of Duddy Kravitz, au Festival de Cannes. Ce long métrage de 1974 avait été le premier à mettre en vedette Richard Dreyfuss et il s'agit de l'adaptation d'un roman. Devinez de qui est ce roman ? De Mordecai Richler.

mardi 28 mai 2013

Alexandrie, Alexandra

Hier vaste ciel bleu parcouru de nuages blancs poussés par un vent frais. Aujourd'hui, pluie et ciel plombé de vastes nuages gris. Les noms savants des nuages (nimbus, cumulus, stratus…) ne me disent rien. Ils ne font pas surgir dans mon esprit la forme qui leur est associée et je regrette cette ignorance.

Hier, promenade jusqu'à l'Alexandra Palace, immense bâtiment posé au sommet d'une colline depuis laquelle on voit Londres s'étendre. Ce n'est pas la même sensation qu'à Montmartre, où l'on contemple Paris d'en haut d'un point situé dans la ville. Alexandra Palace se trouve à côté de Muswell Hill, au nord de Londres. On est nettement plus loin de ce centre que l'on aperçoit, au loin.

samedi 25 mai 2013

Bonjour, notre petite table


Comme je l'ai écrit hier, mes séjours à Londres ne sont pas synonymes de farniente. J'emporte donc avec moi mon ordinateur. Mais je ne peux pas prendre aussi la table de camping que j'utilise, à Paris, comme "bureau". Pourquoi une table de camping ? Parce qu'elle est légèrement plus basse qu'une table normale, ce que je trouve moins fatigant pour mon dos et mes épaules. Mais à Londres, il fallait faire avec ces tables "normales". Jusqu'à avant-hier. Car je viens de faire l'acquisition d'une petite table pliante dont l'utilité pratique officielle est de servir à poser dessus un poste de télévision. Étant donné que l'ordinateur remplace pour beaucoup la télévision, je n'ai pas trop détourné cette table de sa fonction d'origine. Enfin, je crois.

Je viens de finir la lecture du roman de Peter Ackroyd Hawksmoor. J'en avais lu beaucoup de bien et j'ai enfin pu juger sur pièces. Ce récit parallèle de la construction d'églises à Londres au début du 18e siècle et d'une série de meurtres liés à ces mêmes églises à l'époque contemporaine ne manque pas d'intérêt. On pourra penser qu'Ackroyd en fait des tonnes, surtout au niveau de l'écriture, que l'on peut trouver un peu trop maligne (rédaction des parties se passant au 18e siècle à la manière de l'écriture de cette époque, phrases liant la fin d'un chapitre au début du chapitre suivant, séquence dialoguée comme un texte théâtral juste après que des personnages soient allés au spectacle…) Or, paradoxe, cette écriture parfois lourdingue est  mise au service d'un récit qui, au bout du compte, suggère plus qu'il n'explique. Je ne suis toujours pas convaincu qu'Ackroyd soit un bon écrivain - son essai Albion m'avait quelque peu agacé par ce que j'avais perçu comme un manque de rigueur intellectuelle - mais je suis prêt à lui laisser le bénéfice du doute. 

vendredi 24 mai 2013

Retour à Londres

À Londres depuis mardi, pour trois semaines. Quand j'annonce que je pars, tout le monde me souhaite de bonnes vacances, mais lorsque je prends l'Eurostar, c'est toujours avec du boulot dans ma valise. Cette fois-ci : des traductions pour le prochain Mickey Parade Géant, pour le prochain tome de la Dynastie Donald Duck (le douzième, déjà), le cinquième tome de La Grande Guerre de Charlie et l'histoire de la BD suédoise. Ce dernier, j'en traduis des petits bouts entre deux bouclages.
Cela ne veut pas dire que je ne sorte pas. Mercredi, je suis allé à Muswell Hill acheter pour Ben Bring Up the Bodies, le dernier Hilary Mantel qui vient de sortir en poche. Il avait adoré Wolf Hall, volume précédent de ce qui promet d'être une trilogie, si j'ai bien compris, dont l'action se passe à l'époque d'Henri VIII. Je suis passé par Cherry Tree Wood et un petit segment du Capital Ring, cette promenade découverte grâce au blog d'André-François Ruaud.
Hier, petite visite en centre ville où j'ai retrouvé mon ami Paul Gravett, qui participait à un débat à la librairie Orbital Comics sur le thème de l'appropriation des images, thème lié à l'exposition consacrée à Roy Lichtenstein qui a lieu en ce moment à la Tate Modern (encore pour quelques jours) et à l'exposition Image Duplicator où des auteurs de BD travaillaient à partir des images ayant servi de source aux tableaux de Lichtenstein. Malheureusement, le débat ne décolla pas vraiment, certains participants se contentant de ressasser les habituelles antiennes en matière de pop art. Replacer les tableaux de Lichtenstein dans le contexte de l'époque, je veux bien, mais il me semble que cinquante ans après, c'est un point de départ à une discussion sur les relations entre la BD et l'art contemporain, pas une sorte d'argument massue destiné à clore tout débat.

mercredi 1 mai 2013

Il arrive que Donald ne casse pas trois pattes à un canard (mais il arrive aussi que si)


Quand on traduit, et donc que l'on lit, beaucoup de BD Disney, comme c'est mon cas, on est bien forcé de constater que tout n'est pas du même niveau. Des milliers, des dizaines de milliers de BD ont été produites depuis les années 1930 avec Mickey, Donald, Picsou et les autres, mais tout n'est pas mémorable, loin de là. Il faut bien remplir les pages de tous ces hebdomadaires, mensuels et trimestriels. Alors, dans l'exercice de mon métier, je me retrouve parfois - heureusement, pas souvent - à traduire des BD d'une bêtise absolue, d'une invraisemblance totale, des bandes aux scénarios tellement mauvais qu'elles n'auraient même pas fait rire Charlie Schlingo au quatre-vint-quatorzième degré. 
Il n'y a pas longtemps, j'ai traduit une histoire qui semblait avoir été écrite par un gamin de six ans où Donald, rendu amnésique par un coup sur la tête, se prenait pour un marin et s'embarquait sur un bateau dont l'équipage le prenait pour un vieux loup de mer. Tous les personnages censés être des adultes se comportaient comme des enfants crédules et naïfs. Il suffisait à Donald de dénoncer ses neveux, partis à sa poursuite, comme de dangereux pirates, pour que tout le monde le croie sur parole. 
En ce moment, je suis sur une histoire où Picsou se retrouve en prison parce que les Rapetou ont cambriolé une banque en s'aidant de Donald déguisé en Picsou (et convaincu par eux qu'il tournait un film). Ce genre de scénario donne un sens nouveau à l'expression "tiré par les cheveux". 
Et en même temps, la revue qui publie ces niaiseries a également au sommaire de très bonnes bandes, comme Doubleduck (Donald agent secret), une série d'épisodes scandinaves où les Castors Juniors voyagent dans le temps (dessinés par le très bon Alrid Midthun) et une version de Dracula avec Mickey, Minnie et compagnie dans les rôles principaux.
Et pour dire que je ne tombe pas que sur des navets : il me reste à traduire une histoire courte où Donald reçoit une carte de crédit et se met à dépenser sans compter, juste avant que Picsou ne ferme l'usine de margarine où il travaille pour faire produire moins cher à l'étranger. Le dessin est de Vicar, dessinateur argentin récemment décédé, qui était alors au summum de la loufoquerie graphique, et le scénario d'un certain Gaute Moe, auteur de BD norvégien qui, d'après l'encyclopédie INDUCKS, travaillerait à temps partiel comme conducteur de tram. À paraître dans quelques mois dans Super Picsou Géant n°177 et chaudement recommandé.