mardi 27 novembre 2012

Terminé de lire dans le train…


…en rentrant de Londres tout à l'heure : Art and Sex in Greenwich Village de Felice Picano. Le sous-titre, "Gay Literary Life after Stonewall", semble de prime abord trompeur. Il n'est pas question de toute la vie littéraire gay après Stonewall mais de la petite maison d'édition gay créé par Picano, SeaHorse Press, et d'une autre maison d'édition gay un peu plus grande créée par Picano avec les fondateurs de deux autres petites maisons d'éditions gay, JH Press et Calamus Books. Il s'agissait des Gay Presses of New York. La lecture de ce bouquin (acheté chez PS Brighton, une librairie de solde neuve tout à fait recommandable) s'avère absolument passionnante pour le passionné de culture gay et d'histoire de l'édition que je suis. Et Picano, en parlant de sa propre expérience d'éditeur à la fin des années 1970 et durant les années 1980, arrive quand même à brosser un portrait de la vie littéraire gay new yorkaise de l'époque. J'ai même trouvé dans son ouvrage la réponse à une question qui me turlupinait depuis un quart de siècle : pourquoi la première édition en livre du comic strip Wendel d'Howard Cruse, parue en 1985, s'était épuisée si vite et surtout n'avait jamais été rééditée, sujet de grande frustration pour moi puisque je n'avais jamais pu mettre la main dessus. Je reviendrai là-dessus un de ces jours. En attendant, si le sujet vous intéresse, Art and Sex in Greenwich Village est paru en 2007 chez Carroll & Graf Publishers et ne devrait donc pas être trop difficile à trouver sur Amazon ou AbeBooks.

jeudi 22 novembre 2012

Quand Donald Duck n'avait pas de neveux

En ce moment, je travaille sur une exposition qui aura lieu au prochain Festival International de la BD d'Angoulême. Le titre en est Mickey et Donald : tout un art et présentera quelques-uns des auteurs de BD qui ont travaillé sur ces grands personnages classiques de Walt Disney. Bien sûr, il y sera question de ceux que connaissent tous les amateurs de BD Disney : Floyd Gottfredson, Carl Barks, Romano Scarpa, Don Rosa, etc. Mais à l'occasion des recherches que je fais pour la préparation de cette expo, je découvre ou redécouvre des éléments vraiment très peu connus de l'histoire de la BD Disney. 
Par exemple, qui a été le premier auteur de BD à envoyer Donald Duck dans de vraies aventures de longue haleine ? Si vous avez répondu Carl Barks, vous avez tout faux. Même si Barks envoie Donald et ses neveux à l'aventure dès 1942 (dans sa première BD, Donald Duck Finds Pirate Gold), il a été précédé de presque cinq ans par un Italien du nom de Federicho Pedrocchi. Ce dernier est l'auteur, scénario et dessin, de Paperino e il mistero di Marte ("Donald et le mystère de Mars") paru dans l'hebdomadaire Paperino e altre avventure à partir du numéro 1 (30 décembre 1937). Cette histoire de dix-huit pages où Donald fait cavalier seul sera suivi par une autre, Paperino inviato speciale ("Donald envoyé spécial") où il devient journaliste et fait équipe avec Peter le cochon, son ancien compagnon de débauche du dessin animé La Petite Poule avisée, dans lequel il avait fait ses débuts en 1934.
Et Pedrocchi n'était pas le seul Européen à faire vivre des aventures à Donald. Un certain William A. Ward, dessinateur et producteur de dessins animés, réalise Amongst the Hillbillies with Donald and Mac dans l'hebdomadaire britannique Mickey Mouse Weekly à partir du numéro 104, du 29 janvier 1938 (donc moins d'un mois après le lancement des aventures italiennes de Donald). Le Mac dont il est question est un vieux marin à moustache et truffe de chien, création originale de Ward qu'il réutilisera dans d'autres créations comme Donald Duck with Mac in Quest for the Giant Weed et Donald Duck with Mac in A Trip to the Moon.
Pedrocchi et Ward ont eu à affronter le même problème : donner à Donald un compagnon d'aventures (ça évite que le héros se parle à lui-même tout le temps). Ils ne pouvaient pas, comme Barks, utiliser Riri, Fifi et Loulou, qui ne font leurs débuts en BD qu'à la fin 1937 et en dessin animé début 1938. Pedrocchi se rabat sur Peter le cochon, comparse déjà bien oublié après son unique apparition de 1934. Par la suite, il utilisera Dingo comme faire-valoir de Donald. Ward, à l'inverse, crée de toutes pièces Mac, un vieux loup de mer, ce qui est somme toute assez logique puisque Donald porte lui-même en permanence un costume de marin.
Il est intéressant de constater que ces essais n'ont guère eu de postérité. C'est bel et bien la version de Barks (Donald associé à ses trois neveux) qui s'est imposée, peut-être parce qu'elle convenait mieux au caractère du personnage, peut-être à cause de l'énorme influence exercée par l'Homme des Canards sur la BD Disney d'après-guerre. En tout cas, force est de constater que dans les quelques histoires où Donald est associé au perroquet José Carioca et au coq Panchito, il se retrouve à jouer les clowns blancs face à deux personnages encore plus farfelus que lui. C'est également vrai dans les quelques histoires du trio parues vers 1945 et dans la superbe histoire de Don Rosa Le Retour des 3 Caballeros que j'avais eu le plaisir de traduire, il y a… hou là là, si longtemps que ça ?

mercredi 21 novembre 2012

La Coiffe qui décoiffe


Sans être aussi stakhanoviste que mon camarade Alex Nikolavitch, je traduis beaucoup, beaucoup de choses. Mais j'en ai rarement autant sué que sur la version française de The Birth Caul, à paraître aux éditions çà et là, que je viens de terminer. 
Au départ, The Birth Caul (littéralement : "La Coiffe de naissance") est le texte d'une performance donnée par Alan Moore le 18 novembre 1995 au Vieux Tribunal de Comté de Newcastle-upon-Tyne. Cette performance restera unique, comme toutes celles d'Alan Moore, qui ne les considère pas à proprement parler comme des spectacles mais plutôt comme des cérémonies magiques. Quelques années plus tard, Eddie Campbell, collaborateur de Moore sur From Hell, propose au barbu de Northampton de réaliser une adaptation graphique du texte. Il l'édite en 1999 dans le cadre de sa maison d'édition eddie campbell comics. Cette version a été reprise en 2010 chez l'éditeur anglais Knockabout avec une autre adaptation de Cambell d'un texte de Moore, Snakes and Ladders, dans un volume intitulé A Disease of Language.
Mais, me direz-vous, qu'est-ce qu'il y avait donc de si compliqué à traduire dans ce petit bouquin de quarante-huit pages ? Rien. Et tout. Alan Moore n'y utilise pas de mots compliqués ni de tournures de phrases tarabiscotées, son texte étant conçu pour être lu à voix haute devant un public censé l'appréhender immédiatement, puisqu'il n'avait pas la possibilité de revenir en arrière. Mais Moore use d'une langue très riche, précise, garnissant ses substantifs de nombreux épithètes, dont la sonorité compte presque autant que le sens. Bref, une langue poétique, dont n'importe quel traducteur vous dira que c'est la plus difficile à traduire, justement à cause de cet entremêlement du sens et du son qui en fait la spécificité. Autant dire que les quelque cinq cents pages de From Hell n'étaient qu'amusette comparées à ces quarante-huit pages là. 

samedi 6 octobre 2012

Dial J for JEAN-PAUL

L'autre jour, je suis passé dans une boutique de comics où je ne vais jamais, alors qu'elle est vraiment proche de chez moi. Beaucoup de versions françaises en stock, mais quand même quelques imports américains, et je décide de donner une deuxième chance à Dial H, un comic book de la gamme "New 52" de chez DC. J'en avais acheté le numéro 1 à Londres et ça ne m'avait pas enthousiasmé plus que ça. 
Là, j'ai pris les numéros 2 et 3. Ce n'est pas encore merveilleux, mais je vais peut-être quand même continuer, ne serait-ce que pour voir où l'auteur du scénario, China Miéville, veut en venir. Miéville est britannique et apparemment un écrivain assez connu, qui plus est pour avoir, semble-t-il, écrit des romans de SF qui se seraient vendus en dehors du cercle des amateurs de SF. Malheureusement, le dessin de Dial H est assuré par un certain Mateus Santolouco au trait assez fouillis, plutôt tarabiscoté, et pas franchement agréable à regarder. Cela dit, il fait de son mieux pour rendre compréhensible une histoire assez embrouillée, celle d'un type au bout du rouleau, ex-vedette sportive à qui la vie n'a pas fait de cadeau hormis un paquet de kilos en trop, qui découvre une cabine téléphonique à l'ancienne. Chaque fois qu'il compose les lettre "H.E.R.O." sur le cadran, il se retrouve transformé en un super-héros différent et franchement bizarre.
Dial H est une énième itération de la série des années 1960 "Dial H for HERO" qui paraissait dans House of Mystery. J'ai toujours eu un faible pour cette bande où le jeune Robby Reed trouvait un cadran qui le transformait en différents super-héros. C'est une des rares séries dont j'aie la collection complète (elle ne compte que dix-huit numéros). Par contre, si j'ai acheté la version des années 1980 quand elle paraissait dans Adventure Comics, je n'ai pas poursuivi lorsqu'elle est devenue la back-up de New Adventures of Superboy. Et j'ai carrément zappé la version de 2003, intitulée simplement H.E.R.O., dont mon ami François Peneaud m'a pourtant dit le plus grand bien.
Je vais donc essayer de rester assez longtemps sur ce nouveau Dial H pour voir s'il en vaut la peine, mais je me rends compte que c'est moins par intérêt pour l'équipe créatrice que par curiosité vis-à-vis d'un concept de série qui me tient à cœur. Le cadran qui vous transforme en super-héros différent à chaque fois, je trouve cela délicieusement crétin et farfelu à la fois. Bon, j'ai une excuse : j'ai dû lire ma première histoire de Robby Reed et son "H dial" lorsque j'avais onze ou douze ans. Nostalgie, quand tu nous tiens !

mardi 4 septembre 2012

Les Hommes à moustache se ressemblent et les signes diacritiques sont aux abonnés absents



En haut, le commissaire Tanaka, de la série 8 Man. En bas, l'inspecteur (sic) Gordon du  Batman nippon. Tous les deux sont dessinés par Jirô Kuwata. On pourrait presque jouer au sept différences (les sourcils, la forme du nez, la moustache…) Il n'empêche qu'ils font assez Dupond et Dupont.

Je viens de m'apercevoir d'une chose qui ne m'avait pas frappée auparavant : dans l'ouvrage Bat-Manga! d'où est tirée l'illustration du bas, les voyelles longues ne sont pas notées. Ainsi, Jirô devient Jiro, l'hebdomadaire Shônen King est noté Shonen King, etc. C'est une aberration orthographique parce que la langue japonaise distingue les voyelles courtes des voyelles longues. 
J'avais déjà eu affaire à cet étrange mépris des anglo-saxons pour la graphie nippone lorsque j'avais traduit la biographie d'Osamu Tezuka par Helen McCarthy pour les éditions Eyrolles. Je m'étais embêté à rétablir le maximum de voyelles longues non notées, que ce soit dans les titres (BD, dessins animés) ou les noms de famille (et c'est dans ces moments-là que l'on se dit qu'internet est une invention formidable). 
J'avais cru que cette idiotie avait pour origine la paresse d'un maquettiste qui ne voulait pas s'embêter à trouver une police de caractères incluant les signes diacritiques (c'est-à-dire le trait que l'on met au-dessus d'une voyelle pour indiquer qu'elle est longue ; en français, l'accent circonflexe se prête très bien à ça). Mais non ! J'ai posé la question à Helen McCarthy lors d'un repas dans un restaurant japonais à Londres (trop people, que je suis) et elle m'a appris que les éditeurs britanniques, mais surtout américains, craignaient que cette graphie ne rende le livre difficile d'accès aux lecteurs qui n'auraient pas su comment l'interpréter. Si même les éditeurs prennent leurs lecteurs pour des imbéciles, la culture est mal barrée !

lundi 3 septembre 2012

8 Man ! Eiii-to Man !

On pourrait croire qu'il est facile de lire des mangas quand on est Français, étant donné le nombre impressionnant de bandes dessinées japonaises traduites par les éditeurs francophones. Seulement voilà: ce nombre impressionnant se limite pour l'essentiel à des mangas récents. Si l'on veut explorer une époque antérieure aux années 1980, une seule possibilité : prendre ses notions de japonais et son dictionnaire sous le bras et s'attaquer à un recueil d'œuvres classiques en version originale. Fort heureusement, de même qu'en France, la notion de "classique" est fort galvaudée dans l'édition nippone et il ne manque pas, dans le lot, de BD d'aventures pour adolescents qui ont l'avantage d'être faciles à comprendre parce que l'on n'y parle pas trop et que les lectures des idéogrammes y sont données systématiquement.

En ce moment, je lis 8 Man (prononcé "Eight/Eito Man") de Kazumasa Hirai (scénario) et Jirô Kuwata (dessin). Oui ! Le même dont j'ai déjà parlé ici pour dire que lorsque le dessinateur avait réalisé une BD de Batman, il avait repris les traits du héros d'8 Man et de son assistant pour Bruce Wayne et Dick Grayson. La bande est parue dans Shônen Magazine de mai 1963 à mars 1965 (et non 1966, comme le recopient entre elles toutes les notices wikipedia occidentales - la notice nippone se contente de donner la date de début puis se concentre lourdement sur la série télévisée inspirée de la BD). Il y eut un dessin animé, diffusé au Japon de novembre 1963 à décembre 1964 et aux Etats-Unis à partir de 1965 sous le titre 8th Man. Et au moment où je tape ces lignes, le générique japonais du dessin animé me trotte dans la tête et je crois qu'il va avoir du mal à en sortir (les curieux peuvent l'écouter ici). "Fight ! Fight ! Fight, fight fight ! Eight ! Eight ! Eight, Eight, Eight !" C'est parti pour la journée.
Ça ne manque pas de sel de lire une BD de presque cinquante ans. Le héros est un robot qui se dissimule sous l'identité secrète du détective privé Hachirô Azuma (dont le "hachi" du prénom s'écrit et se prononce comme le 8 japonais). Il collabore avec la police (le commissaire Tanaka, encore un homme à moustache) sans que son statut de détective privé semble poser le moindre problème à qui que ce soit. Dans l'épisode que je suis en train de lire, il va dans un lycée de jeunes filles demander des renseignements au directeur sur l'une de ses élèves et le monsieur lui déballe tout ce qu'il sait sans s'inquiéter de ce qu'il dévoile sur une mineure à un parfait inconnu - bon, tout de suite après, la mineure en question, qui a des pouvoirs psi, déclenche une attaque de corbeaux et de chiens errants sur ses camarades de classe, donc on peut penser que l'intervention du détective privé était justifiée. Autre détail qui marque son époque : quand 8 Man veut reprendre des forces, il aspire dans un petit cylindre qui ressemble à s'y méprendre à une cigarette. Envoyé à l'hôpital et incapable de bouger, il demande au médecin de lui glisser sa "cigarette" dans la bouche pour qu'il puisse s'en griller une ! On imagine mal une telle scène aujourd'hui.
Un autre aspect frappant, c'est la prolifération des super-héros dans la BD japonaise à la fin des années 1950 et jusqu'au milieu des années 1960. Etant données les dates, le phénomène ne semble avoir aucun rapport avec la Batmania américaine et seulement un peu avec la popularité locale de Tetsuwan Atom/Astro Boy. Je soupçonne aussi un effet conjoint de l'air du temps (la conquête spatiale entraînant un intérêt pour la science et la SF) et de la popularité de Superman, en particulier à travers la série télévisée des années 1950.

mercredi 22 août 2012

Un article sur le bara

Quand je vois mon jeune camarade Alex Nikolavitch qui blogue quasiment tous les jours, voire deux fois par jour, sur son blog d'enfer la War Zone, je me dis que je suis vraiment une grosse feignasse. Mais bon, que voulez-vous, on ne se refait pas ! À ma décharge, je dirais que je bossais, mais comme Alex aussi, l'excuse n'est peut-être pas si bonne que ça, finalement.
Mais au fait, je bossais sur quoi ? Oh, plein de choses, depuis le dernier post (qui remonte quand même au mois de mai). Pour n'en citer que quelques-unes : la traduction de Harvey Pekar's Cleveland, un roman/mémoire graphique qu'Harvey Pekar avait voulu consacrer à sa ville natale de Cleveland, et qu'il ne verra jamais achevé pour cause de mort inopinée (à paraître chez çà et là) ; la traduction de diverses BD Disney dont un épisode de PKNA/Paperinik New Adventures, une série bien chtarbée publiée en Italie à la fin des années 1990/début des années 2000, et dont nous n'avons vu en France que la troisième mouture, alors que la version d'origine arrachait bien sa planète, comme diraient mes copains qui parlent djeunz (à paraître dans Super Picsou Géant 172, mais je vous recommande tous les numéros avec cette série, qui je crois y paraît depuis le 170) ; la traduction (encore) du tome 3 de Charley's War, rebaptisé en français La Grande Guerre de Charlie, bande anglaise cultissime (ou qui devrait l'être) sur la Première Guerre mondiale, avec une mentalité anti-guerrière assez réjouissante (à paraître chez Délirium). Et puis, tout récemment, un article sur la BD porno gay japonaise pour la revue Manga 10000 images.
Ça, ça me tient particulièrement à cœur. Je m'explique. Manga 10 000 images est une initiative formidable, une revue thématique érudite sur la bande dessinée japonaise, le genre de truc que j'aurais dévoré s'il avait existé dans les années 1980-1990. J'ai eu le bonheur de participer au numéro 2, consacré à Osamu Tezuka, ce qui m'a permis de (et poussé à) finaliser un projet d'article que j'avais depuis des années sur la refonte effectuée par Tezuka de Shintakarajima, son premier "story manga", pour la collection de ses œuvres intégrales par Kôdansha. Et il était question depuis quelques années, que je réalise un article sur le bara, c'est-à-dire la bande dessinée pornographique/érotique gay japonaise destinée à un lectorat gay (donc distincte du yaoi ou boys love, destiné à un lectorat féminin hétérosexuel). L'article était initialement prévu pour un numéro consacré à la BD underground nippone, puis il s'est intégré dans un projet de refonte complète du numéro 1, dont le thème était le yaoi et l'homosexualité dans les mangas.
Tous ceux qui me connaissent que l'homosexualité dans la BD est un thème que j'affectionne. Cet article sur le bara a donc été pour moi l'occasion de faire le point de mes propres connaissances sur un sujet, il faut bien l'avouer, assez pointu. Première constatation : on ne trouve que très peu de documentation sur le sujet, que ce soit sur papier ou en ligne. J'ai donc eu l'impression de ne pas perdre mon temps et d'accomplir un réel travail de défrichage. Deuxième constatation : le bara est essentiellement connu en occident à travers un auteur, Gengoroh Tagame, dont seule une partie de l'œuvre est disponible dans des langues occidentales (cinq volumes en français - devenus six par travail éditorial - trois volumes en espagnol, deux en italien… et bientôt une anthologie en anglais). Cela ne représente même pas la moitié des BD qu'il a réalisées, et n'avance évidemment pas la connaissance des nombreux autres auteurs de bara.
À partir de ces constatations, il m'a bien fallu tirer la conclusion qui s'imposait : une grande partie des informations et jugements de valeur qui se retrouveraient dans mon article devraient venir de l'exploitation des données disponibles dans la petite collection de bara achetés au fil des ans à des boutiques japonaises en ligne (merci internet). C'est dans ces moments-là que j'ai le sentiment de ne pas avoir totalement perdu mon temps en consacrant quelques années à l'étude de la langue nippone. 

mercredi 2 mai 2012

Le long de la Seine

Hier, grande promenade ouarf-ouarf sans chien mais avec Caspar. 

Passé le parc de Bercy, nous avons poursuivi jusqu'à Bercy-Expo, puis avons longé la Seine. Je voulais traverser la Seine au Pont National, mais je confirme ce que je soupçonnais depuis un moment : il est impossible pour un piéton de l'atteindre depuis le Quai de Bercy. Nous avons donc poursuivi le long de la Seine jusqu'au pont Nelson Mandela, qui relie Charenton à Ivry, notant au passage que sur un kilomètre, aucun tunnel ou passerelle qui passerait au dessous ou au dessus de l'autoroute ne permet d'accéder à la longue promenade aménagée. Dommage pour les employés des nombreuses entreprises situées de l'autre côté du flot de voitures, qui aperçoivent depuis leurs fenêtres cet espace de verdure auquel ils n'ont pas accès. 

Arrivés du côté d'Ivry, une promenade est aménagée le long du port autonome de Paris, où se succèdent les entreprises de béton et autres matériaux de construction. Impressionnant, de voir d'en haut ces entrepôts où sont rangés comme dans un magasin de bricolage, mais à une échelle géante des sacs de ciment par dizaines et des placos grands comme des pans de murs. De retour dans Paris, les fabriques de béton continuent d'occuper les quais devant les anciens moulins devenus Université Paris 7. Là encore, ce sont des barges remplies d'énormes tas de sables, déjà montées sur le quai ou attendant d'y être montées depuis les péniches qui les ont transportés jusque là. 

Arrivés à la BNF, nous avons retraversé la Seine sur la passerelle qui rejoint le Parc de Bercy, et nous sommes revenus chez moi en faisant un détour par la gare de Paris-Bercy. J'aime beaucoup cette petite gare souvent inconnue des Parisiens (j'ai moi-même longtemps ignoré son existence). Elle a des allures de gare de ville de province et on s'y croirait soudain bien loin de Paris, une après-midi de 1er mai ensoleillé.

 Sous le Périphérique

 Fabrique de béton à Ivry

Quai Panhard et Levassor, à Paris

mercredi 11 avril 2012

Il faisait beau à Brighton hier


C'est devenu une habitude : quand je suis en Angleterre, Ben et moi allons passer une journée à Brighton, avec nos amis Dave et John. J'aime les stations balnéaires hors saison. Hier, les congés scolaires et le beau temps n'arrivaient pas à contrecarrer les effets désertificateurs du jour de semaine et du vent frais ("vivifiant", comme on dit dans Astérix). Et donc, il n'y avait pas grand monde sur la plage et sur la promenade, où nous sommes allés après le déjeuner.



Les rues, par contre, étaient pleines de monde et de voiture. Brighton n'est pas seulement une station balnéaire, c'est aussi une vraie ville, avec sa circulation (difficile).
Mes séjours à Londres sont devenus si fréquents qu'ils ne constituent plus un dépaysement, mais aller passer une journée au bord de la mer continue de garder un parfum de vacances.

mercredi 28 mars 2012

Kristiina Kohlemainen (1956-2012)

Ce soir, je suis allé à la librairie Violette and Co pour une rencontre avec l'auteure suédoise Johanna Hellgren, qui vient de sortir le troisième et dernier volume de sa série Frances aux éditions Cambourakis. L'entretien avec Johanna était très intéressant et m'a permis de découvrir sa fort belle série, mais j'ai eu la tristesse d'apprendre la mort de Kristiina Kohlemainen.
Kristiina, Finlandaise vivant en Suède, avait un enthousiasme apparemment inépuisable et communicatif pour la BD d'auteur et la small press. Créatrice de la Serieteket (Bédéthèque) au sein de la Kulturhuset, énorme centre culturel situé en plein centre de Stockholm, elle y organisait depuis plusieurs années un festival nommé SPX consacré à la Small Press et à la BD indépendante, rebaptisé récemment Stockholms Internationella Seriefestival.
J'avais fait sa connaissance à Stockholm en juillet 2009. Elle m'avait fait venir pour que je donne une conférence sur la BD LGBT (en suédois on dit HBT) à la Kulturhuset à l'occasion de la Gay Pride. Je garderai toujours le souvenir de la visite qu'elle m'avait fait faire de la ville.


Je avais revu Kristiina au dernier festival d'Angoulême, où l'on pouvait voir l'exposition hommage à Strindberg par la fine fleur de la BD d'auteur suédoise, expo qu'elle avait évidemment aidé à organiser (expo visible à l'Institut Suédois de Paris jusqu'au 15 avril). Comme souvent à Angoulême, nous avions à peine eu le temps de nous dire bonjour en pensant que nous aurions une autre occasion de causer. Le cancer qui l'a emportée hier en a décidé autrement.
L'auteur suédois Knut Larsson rend un très bel hommage à Kristiina sur son blog en anglais.

lundi 26 mars 2012

Ça pourrait être…

Ça pourrait être la plage d'une quelconque station balnéaire hors saison. C'est la plage de l'île de Cheung Chau à Hong Kong. Et, oui, il y avait un peu de brume. C'était le 10 février dernier.

lundi 12 mars 2012

Le Musée invisible

On va dire que je ne suis pas rapide, mais ce n’est qu’aujourd’hui, un mois et demi après le festival d’Angoulême, que je viens de m’en rendre compte : je n’ai toujours pas visité le Musée de la Bande Dessinée. Et pourtant, j’étais présent au festival, et cette année j’ai eu le temps de visiter les expositions. Dont une très belle expo intitulée « Le Musée privé d’Art Spiegelman » qui se trouve occuper les locaux dévolus d’ordinaire aux collections permanentes du Musée de la BD. Et qui va continuer à les occuper jusqu’au 6 mai, date de son décrochage.

On a beaucoup commenté l’état de concurrence qui existe, de fait, depuis quelques années, entre le Festival International de la Bande Dessinée et la Cité de la BD. On peut la déplorer, mais elle n’a pas que des effets négatifs, puisque l’édition 2012 du festival voyait l’inauguration de deux expositions liées à la présidence d’Art Spiegelman. Une exposition rétrospective était consacrée à l’œuvre du créateur de Maus, organisée par le Festival et installée, comme il est de tradition, dans le bâtiment Castro de la Cité de la BD, que l’on appelait Centre National de la Bande Dessinée (CNBDI pour faire court) avant son intégration au sein de la Cité, qui regroupe outre ce bâtiment, le Musée de la BD et la Maison des Auteurs. Et dans le même temps, le Musée de la BD accueillait dans ses murs l’exposition « Le Musée privé d’Art Spiegelman ». Il n’y avait pas, à ce niveau, concurrence, mais bien complémentarité, et le résultat était une proposition très riche, qui justifiait à elle seul le déplacement à Angoulême cette année.

Mais dans l’affaire, il faut bien reconnaître aussi que le Musée de la Bande Dessinée a été sacrifié. Rappelons que ce musée qui avait ouvert ses portes en 1991 dans l’actuel bâtiment Castro avait été fermé en 1999, les collections permanentes étant présentées dans le cadre d’une série de « Musées imaginaires de la Bande Dessinée » à partir de janvier 2003. L’actuel Musée a été inauguré en juin 2009. Concrètement, cela veut dire que le « vrai » musée a été fermé pendant dix ans, et que le voilà de nouveau fermé pendant plus de trois mois à peine deux ans et demi après sa réouverture. Et ce justement pendant le Festival de la BD, qui est le moment de l’année où ce musée connaît sa fréquentation maximale.

Certes, on pourra toujours m’objecter que je n’avais qu’à me remuer un peu plus en 2010 et 2011 et trouver le temps d’aller le visiter, ce fameux musée. Ce à quoi je pourrais répondre que si le propre d’une collection permanente n’est pas justement la permanence, alors quel est-il ? Un visiteur passant au Louvre à n’importe quel moment de l’année s’attend à y trouver la Joconde, celui du MoMA de New York les Demoiselles d’Avignon. Pourquoi un visiteur passant au Musée de la Bande Dessinée n’y trouverait-il pas ce qui est décrit sur le site de la Cité de la BD ? Je sais que nous vivons à l’ère du virtuel, mais il me semble dommage que le Musée de la BD, après avoir vécu une décennie dans l’imaginaire, entre de plain pied dans l’invisibilité.

jeudi 8 mars 2012

J'ai vu la Chine je vous l'assure

Enfin, plus exactement, j'ai vu Hong Kong, ce qui n'est qu'un petit bout de la Chine mais qui est déjà pas mal étant donné que je n'avais devant moi que quatre jours (et trois nuits). C'est assez impressionnant. Nous étions (nous, c'est mon ami Bruno et moi) logés dans l'hôtel Metropark Mongkok. Comme on pourra le constater en cliquant sur ce lien, cet établissement est situé au nord de la partie principale de Kowloon, la péninsule qui fait face à l'île de Hong Kong proprement dite, et à proximité de Nathan Road, une artère commerçante qui s'étire sur plus de trois kilomètres. Ce qui est amusant lorsque l'on explore Nathan Road avec Google Street view, c'est qu'on a l'impression que cette grande rue n'est pas trop fréquentée. Les photos ont dû y être prises tôt le matin car je peux vous assurer que toute la journée et jusque tard le soir, c'est la cohue. Mais une cohue bonhomme, au sein de laquelle on ne se sent pas stressé comme dans la foule d'une grande ville occidentale. En tout cas, c'est l'impression que j'ai ressentie.
La photo ci-dessus n'est pas de Nathan Road mais d'une rue parallèle, plus petite, d'où l'on voyait bien le contraste entre les différents types de constructions.

vendredi 24 février 2012

Cette image appartient déjà au passé

Et pourtant, cette photo, prise de la fenêtre de l'appartement où je réside à Londres, n'a que quelques heures. Mais à présent, il fait nuit.
J'ai passé l'essentiel de cette journée sur la traduction d'une interview de Robert Crumb, qui m'occupe depuis mon arrivée (c'est une très longue interview). J'ai commencé à y travailler le mercredi 15 février, ayant accepté de la faire deux jours avant, la veille de mon départ pour l'Angleterre.
Je n'avais pas vraiment prévu de travailler autant durant mon séjour. La traduction des textes introductifs du volume 8 de l'intégrale Carl Barks était au programme, mais elle n'était pas trop urgente (elle va commencer à le devenir). Et voilà que l'on me propose de traduire cette interview de Crumb réalisée par Gary Groth pour le Comics Journal n°121 paru en 1988. Bien sûr, c'est un travail urgent : l'entretien sera inclus dans un livre sur Crumb qui devrait paraître à l'occasion de l'exposition à lui consacrée au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris. J'ai fini tout à l'heure le premier jet (comme d'habitude, une sorte de sabir déjà plus anglais mais pas encore tout à fait français).
Bizarre impression que de replonger dans cet entretien si ancien, dont les références sont tellement datées (Crumb avait alors 43 ans, presque dix ans de moins que mon âge actuel, Ronald Reagan était président des Etats-Unis, l'U.R.S.S. existait encore, etc.) Et pourtant, une chose m'avait marquée, dans les propos de Crumb : à l'âge de 5 ans, il était sexuellement attiré par Bugs Bunny. Ça ne s'invente pas, des trucs comme ça.
Le passé est déjà là et il nous bouffera tous.

mardi 21 février 2012

En ce moment, je suis à Londres…




…et je traduis une longue, très longue interview de Robert Crumb qui date des années 1980. Résultat : je ne sors pas beaucoup et j'écoute passer les trains (les métros, en fait).


mercredi 18 janvier 2012

Angoulême 2012 : demandez mon programme !

Ne me cherchez pas dans les rues de Paris entre le 24 et le 29 janvier : je serai dans notre bonne ville d'Angoulême. Je me manquerai pas d'y porter différentes casquettes selon le jour, l'heure, voire le moment. Voici quelques détails :

Le mercredi 25 janvier, je participe au stage de formation pour bibliothécaires organisé par la Cité de la bande dessinée dont le thème est, cette année "La Bande dessinée, fenêtre sur le monde". J'y interviendrai de 10h45 à 12h dans le cadre d'une discussion intitulée "Quelle bande dessinée américaine aujourd'hui dans les librairies françaises ?"

Du jeudi 26 janvier au samedi 29 janvier dans le cadre du 39e Festival International de la Bande Dessinée auront lieu au conservatoire Gabriel Fauré des conférences sur la bande dessinée dont je suis l'organisateur. Tous les détails sur le site du festival dans la rubrique "Programmation 2012" puis "Heure par Heure".

Également au festival d'Angoulême, un stand de l'association LGBT BD avec des auteurs en dédicace (Blan et Galou, Jéromeuh, Hugues Barthe…) Tous les détails en cliquant ici. Et un débat sur le thème "La BD gay sur internet" dont j'assurerai l'animation et auquel participeront Blan, Soizick, Jéromeuh et Dimitri Lam. Ça aura lieu le vendredi 27 janvier 2012 de 11h à 12h30 dans la salle Brassens du conservatoire Gabriel Fauré,

lundi 16 janvier 2012

Ma carte de visite

Parfois, je me dis que je suis grave. Tous les ans, je vais au beau Festival de BD d'Angoulême et je me dis que je devrais avoir des cartes de visite. Au lieu de quoi, j'en suis réduit à noter mes coordonnées aux gens que je rencontre sur des bouts de papier. Ça fait méchamment pro !
Cette année, enfin, j'ai secoué ma flemme et commandé à un service d'impression en ligne cent cartes de visite dont le recto ressemblera au joli dessin ci-dessus. Il était plus que temps !

lundi 2 janvier 2012

Promenade de début d'année

Je ne pense pas être aussi doué pour les dérives psychogéographiques que mon camarade André-François Ruaud sur son blogue NeVeRLaND, mais il m'arrive de faire quand même de jolies promenades. Aujourd'hui, c'était en compagnie de mon ami Caspar. Nous avions l'intention de voir une exposition à l'Institut Suédois, mais arrivé sur place, il s'est avéré que l'expo que je visais n'était déjà plus là. Nous avons donc poursuivi notre chemin dans le Marais et sommes passés dans la rue Charlot, une rue du 3e arrondissement ma foi fort intéressante : un ou deux hôtels particuliers, une exposition de photos en plein air sur un mur, un atelier de réparation d'instruments à vent… et alors que nous approchions de la Place de la République, le Marché du Temple, en pleins travaux de rénovation et dont seule demeure, pour l'instant, la vaste carcasse métallique.